
Depuis le 1er novembre 2024, de nombreux tenanciers des débits de boisson au Cameroun ont procédé à un réajustement des prix, révélant des augmentations allant de 50 à 100 FCFA sur les bières et boissons gazeuses. Une décision qui a courroucé le ministre camerounais du Commerce, Luc Magloire Mbarga Atangana, dont les services de contrôle ont apposé des scellés sur certains de ces points de vente dès le 4 novembre 2024, pour augmentation illégale des prix sur des produits dont les prix sont soumis à la procédure d’homologation
« Le ministre du Commerce tient a rappeler à cet égard, que la bière et les boissons hygiéniques figurent bel et bien sur la liste des produits soumis à la procédure d’homologation préalable des prix par son administration, et peuvent éventuellement, à défaut, faire l’objet de négociation par le mécanisme des prix concertés. La récente initiative des exploitants des débits de boisson, qui s’est traduite par une augmentation unilatérale du prix de la bière et des boissons hygiéniques (…) est par conséquent nulle et de nul effet», indique le ministre Mbarga Atangana dans un communiqué publié le 4 novembre 2024.
A l’origine de ce nouveau bras de fer entre le gouvernement et les tenanciers des débits de boisson autour des prix aux consommateurs, apprend-on de certaines sources, se trouve une révision des termes de la collaboration entre les acteurs de la filière, qui aurait induit l’instauration de la facturation d’au moins une prestation. De nouveaux frais que les débits de boisson ont vite fait de répercuter sur les prix aux consommateurs. Contactée par Investir au Cameroun, une source au sein de l’Association des producteurs d’alcool du Cameroun (CAPA, en anglais), qui regroupe les principales unités brassicoles (Boissons du Cameroun, Guiness Cameroun et UCB) et producteurs de vins (Sofavinc) et liqueurs (Fermencam) du pays, dément l’existence d’une telle mesure à l’échelle de la CAPA.
Le patronat au secours des brasseurs
Cependant, les termes du communiqué du ministre du Commerce du 4 novembre 2024 révèlent bel et bien une évolution récente des accords entre au moins une société brassicole et ses partenaires commerciaux, qui a induit la hausse des prix actuellement observée par endroit depuis le 1er novembre 2024. « Le ministre du Commerce (…) a l’honneur d’informer la communauté des consommateurs qu’à l’issue d’une relecture des conventions, qui relèvent de l’accord des parties, liant certaines sociétés brassicoles à leur circuit de distribution, les exploitants des débits de boisson ont cru devoir, en violation flagrante des textes applicables en la matière, procéder à une augmentation illégale du prix de la bière et des boissons hygiéniques», peut-on lire dans le communiqué sus-mentionné.
L’identité de ou des sociétés brassicoles ayant ainsi relu les conventions avec leurs partenaires commerciaux n’a pas été révélée. Les démarches d’Investir au Cameroun auprès de certaines unités brassicoles tout au long de la journée du 4 novembre 2024 pour en savoir davantage n’ont pas été non plus fructueuses. Cependant, dans un communiqué rendu public ce 5 novembre 2024, appelant les « acteurs de la filière brassicole à stabiliser les prix », Boissons du Cameroun, filiale du groupe Castel qui contrôle environ 80% du marché de la bière dans le pays, informe « l’opinion publique nationale qu’elle s’est résolue à instaurer, à compter du 1er novembre 2024, des frais de chargement correspondant à des prestations de manutention, de contrôle et de mise à disposition des bouteilles de bières et alcools mix en verre consigné».
A en croire l’entreprise, qui « s’engage (…) à collaborer avec les pouvoirs publics et toutes les parties prenantes intéressées, pour garantir que ce réaménagement de sa politique commerciale n’affecte pas le prix de la bière et des alcools mix pour les consommateurs »,
l’instauration de ces nouveaux frais « vise à rétablir une certaine équité dans la filière brassicole, face aux frais d’enlèvement facturés et aux majorations de prix pratiqués sur le marché ». En effet, c’est depuis le début de l’année 2022 que les acteurs de la filière brassicole essayent d’obtenir du gouvernement camerounais, une nouvelle augmentation des prix après celle de mars 2019 (50 FCFA par bouteille). Celle-ci faisait suite aux plaintes des brasseurs, après le renchérissement des droits d’accises sur les boissons alcoolisées dans la loi de finances de l’année 2019.
De ce fait, aidée par ce qui s’appelait encore Groupement inter-patronal du Cameroun (devenu Groupement des entreprises du Cameroun), la principale organisation patronale du pays, la CAPA mène un plaidoyer depuis le mois de mars 2022 pour une nouvelle augmentation des prix des bières et boissons hygiéniques au Cameroun.
Au cours d’une concertation organisée le 18 mars 2022 à Yaoundé, entre le gouvernement, les opérateurs économiques et la société civile, le Gicam a plaidé pour une augmentation de 8% des prix aux consommateurs. À en croire l’organisation patronale, cette révision des prix devait permettre de compenser 28 milliards de FCFA sur des surcoûts d’importation de 35 milliards de FCFA enregistrés entre 2020 et 2022 par les sociétés brassicoles. Ces surcoûts, selon le Gicam, sont consécutifs à l’explosion des prix des matières premières et du fret à l’international, après l’atténuation de la pandémie du Covid-19 et le déclenchement, fin février 2022, du conflit russo-ukrainien.
Source : Brice R. Mbodiam( Investir au Cameroun)