Avec près de 92 % de oui, les électeurs ont validé le texte rédigé par le régime militaire du général Brice Oligui Nguema, au pouvoir depuis le coup d’Etat, le 30 août 2023. La prochaine étape sera la tenue d’une élection présidentielle, actuellement prévue en août 2025.
Des observateurs électoraux à l’extérieur d’un bureau de vote, à Libreville, le 16 novembre 2024. NAO MUKADI / AFP
Les bulletins verts l’ont largement emporté sur les bulletins rouges. Selon les données provisoires publiées dimanche 17 novembre par le ministère de l’intérieur du Gabon, les électeurs ont validé à 91,8 % la nouvelle Constitution rédigée par le régime militaire du général Brice Oligui Nguema.
Enjeu crucial de ce référendum porté par le nouvel homme fort du pays, le taux de participation s’est élevé à 53,54 % – bien en deçà des premières estimations (71 %).
Au total, 868 115 électeurs étaient appelés, samedi, à déposer un bulletin vert pour oui ou rouge pour non pendant la journée de vote, présentée par le pouvoir comme un « moment historique » et un « tournant majeur » pour le pays, un peu plus d’un an après le putsch qui a mis fin à cinquante-cinq ans de règne de la famille Bongo.
Une fois les résultats définitifs confirmés par la Cour constitutionnelle, l’étape suivante sera la tenue d’une élection présidentielle, actuellement prévue en août 2025, pour mettre un terme à la transition. Le général Oligui a promis de rendre le pouvoir aux civils mais il ne cache pas ses ambitions présidentielles en promettant aussi un « essor vers la félicité » à ce pays à la fois riche en pétrole et lourdement endetté. « Nous sommes là pour construire le pays, et ce pays on va le construire ensemble », a-t-il déclaré vendredi sous les applaudissements en inaugurant un marché à Libreville.
Aucun incident majeur signalé lors du vote
Les autorités ont renforcé depuis vendredi le couvre-feu mis en place depuis le coup d’Etat du 30 août 2023, avec des horaires « réaménagés de [minuit] à 5 heures du matin durant toute la période du processus électoral ».
Aucun incident majeur n’a été signalé pendant la journée de vote, selon les autorités et selon le Réseau d’observateurs citoyens (ROC), une plateforme d’associations locales soutenue par les Nations unies.
Le pouvoir a présenté comme une « garantie de transparence » la présence d’une trentaine de missions d’observateurs internationaux – écartés lors de la présidentielle d’août 2023, qui avait conduit à la réélection d’Ali Bongo, puis à sa destitution sur des accusations de fraude électorale et de détournement de fonds publics. S’ils ont pu suivre le déroulement du vote, « les observateurs n’ont pas pu assister au processus de dépouillement dans certains bureaux », selon le ROC, qui avait déployé 250 personnes sur le terrain.
Conformément au code électoral gabonais, les bulletins de vote ont été incinérés dans chacun des bureaux de vote après dépouillement. Le procès-verbal des résultats a été centralisé au ministère de l’intérieur, qui s’est substitué aux instances électorales, dissoutes après le coup d’Etat.
Le vote, organisé « dans un contexte de transition où les aspirations à une nouvelle gouvernance et à des réformes structurelles se sont cristallisées », s’est tenu dans une « atmosphère calme et sereine » avec une « organisation structurée et fonctionnelle », a assuré le ROC dans une déclaration publiée dimanche.
Les opposants dénonçaient un texte permettant un régime « dictatorial »
Dominée par la propagande officielle, la campagne, ouverte au début de novembre, avait été marquée par de vifs débats. Les opposants au projet dénonçaient un texte permettant un régime « dictatorial » taillé sur mesure pour le président de la transition, ses partisans affirmant qu’il fallait aller de l’avant en votant oui.
Les 173 articles de la nouvelle Loi fondamentale, fruit de contributions récoltées au printemps lors d’un dialogue national, consacrent entre autres un mandat de sept ans renouvelable une seule fois, avec un régime présidentiel doté d’un pouvoir exécutif fort, sans premier ministre et l’impossibilité d’une transmission dynastique du pouvoir.
Son deuxième article grave dans le marbre l’accession au pouvoir de la junte menée par le général Oligui le 30 août 2023, avec l’instauration d’une « Fête de la libération ». L’article 170 exonère de poursuites et de condamnation « les acteurs des événements allant du 29 août 2023 à l’investiture du président de la transition », le 4 septembre.
Plusieurs dispositions ne pourront faire l’objet d’aucune révision future. Parmi elles : la limite de deux mandats présidentiels successifs, le mode d’élection au suffrage universel direct ou encore le mariage réservé à deux individus de sexes opposés. Disposition nouvelle, le service militaire devient obligatoire, pour les filles comme pour les garçons.